Pensées

moins soi? un commentaire sur le film “self/less”

Que feriez-vous si à l’aube de votre mort, l’on vous donnait 10, 20, 50 années de plus à vivre dans un corps en bonne santé ?

Self/Less est un film de 2015 sur l’histoire d’un homme en fin de vie, milliardaire et architecte. Apprenant qu’il est atteint d’un cancer en phase terminale, il décide d’acheter les services d’un laboratoire qui lui promet la vie éternelle : à sa mort, les données de son cerveau seront transférées dans un cerveau d’un homme plus jeune, dont le corps a été créé en laboratoire. Ainsi, il vivra une seconde vie dans le corps de quelqu’un d’autre. L’argument utilisé par le laboratoire est qu’il faut « préserver les grands cerveaux » le plus longtemps possible. Imaginez qu’Einstein vive encore, de quelles autres découvertes aurait-il pu nous bénéficier ?

Découvrez 3 moments Réflexions dans cet article, et j’accueillerai vos réponses avec grand plaisir en commentaire !

Moment Réflexion n°1 :

Si l’on vous donnait une seconde vie, à quoi la consacreriez-vous ? Serait-ce pour continuer ce que vous faites déjà ? Ou essayer un nouveau chemin ?

Je vous laisse y penser un moment…

Un début de réponse : Je n’ai que 25 ans, mais à bien y penser, c’est déjà le montant d’une vie. Il y a à peine deux siècles et demi, les gens ne vivaient pas beaucoup plus longtemps que cela. On se mariait jeune, et on mourait jeune. Aujourd’hui au 21e siècle, avec notre espérance de vie jusqu’à 100 ans, j’ai la chance de pouvoir vivre l’équivalent de 4 vies du 19e siècle ! Cette réflexion est donc une question que je peux me poser de mon vivant. Si vous vous êtes déjà senti vieux à 25 ans… c’est normal ! C’est la fin de votre première vie. Mais il y en a 3 autres qui arrivent ! Pas de quoi déprimer, si ? 🙂

Cela signifie que j’ai le droit de pouvoir réinventer ma carrière au fur et à mesure de ma vie. J’en ai largement le temps ! Personnellement, ces dernières 25 années, j’ai surtout étudié, cherché les diplômes. Maintenant, je veux produire (un blog !), voyager, continuer à apprendre du monde tant que j’ai un souffle de vie. Je suis curieuse, aventurière, et je compte bien garder ma flamme jusqu’au bout.

J’ai le droit de me réinventer régulièrement. Un diplôme ne me définit pas pour la vie. Ni un travail. Je n’ai même pas besoin d’attendre ma mort pour me remettre en question sur ma trajectoire.

En bref, ne rêvez pas de l’immortalité, car du point de vue des générations d’avant, vous l’avez déjà acquise. Qu’en ferez-vous ?

 

Retour au récit : *** Attention : Spoilers !*** On se demande alors comment l’homme va profiter de sa seconde vie. Contrairement à ce dont quoi son cerveau est capable, au lieu de repartir faire des affaires, il décide de vivre sur le compte en banque qu’il avait accumulé dans sa vie précédente. Il commence sa seconde vie en allant de soirée en soirée, de fille en fille, d’alcool en alcool.

Une routine agréable s’installe, avec le seul inconvénient qu’il doit prendre une pilule chaque jour. D’après le docteur, cela lui permet d’éviter les hallucinations que son cerveau lui donne. Celles-ci sont une conséquence naturelle du transfert de données de cerveau à cerveau. En continuant à prendre les pilules, d’ici un an, ces hallucinations disparaîtront et il n’aura plus besoin d’elles.

Le quotidien tranquille bascule lorsqu’un jour, il oublie de prendre sa pilule et se rend compte que dans une des visions de son hallucination, il y a une femme, son enfant, des images de guerre, et d’autres plutôt violentes. Il commence à douter que ce ne sont pas que des hallucinations, mais plutôt des souvenirs… de quelqu’un d’autre.

Il se met en quête et trouve rapidement la femme de la vision dans un coin paumé à la campagne. Il rentre par effraction chez elle et en regardant ses photos de famille, il se rend compte que le corps qu’on lui a donné n’était pas un corps créé en laboratoire : c’est un corps d’un vrai être humain, vétéran de guerre, dont le nom est Mark. (très pratique qu’il soit vétéran dans un film d’action, du coup Damian hérite de ses instincts de soldat dans les scènes de combat 😉 )

Damian revoit le docteur qui lui explique qu’effectivement, le corps ne vient pas d’un laboratoire.  Mark, de son vivant, avait fait le choix de donner son corps à la science en échange d’assez d’argent pour soigner sa petite fille (bienvenue aux Etats-Unis avec leur super système de santé !). Il avait laissé sa femme veuve et sa fille orpheline sans leur expliquer avant de partir, en échange de la vie.

La réaction immédiate de Damian, naturellement horrifié de se retrouver dans le corps de Mark et d’avoir payé pour l’avoir, est : « Mais pourquoi avoir tué Mark en échange d’argent ? J’en ai tellement, je lui aurais donné si vous m’aviez dit, plutôt que de prendre son corps. » Ce à quoi le docteur répond : « L’auriez-vous vraiment fait ? », et laisse Damian coi.

Et moi aussi.

Moment Réflexion n°2 :

Quels services achetons-nous pour notre propre plaisir, tout en pensant naïvement que les gens derrières ces services ne sont pas impactés ? Si vous vous rendiez compte de l’impact, préféreriez-vous donner vos sous à ces personnes directement ?

Je vous laisse y penser un moment…

Un début de réponse : Dans notre monde globalisé, tout nous vient si facilement qu’on oublie souvent les gens derrières les services qui nous sont accessibles par un seul clic.

  • Commander chez Amazon, alors que les normes sanitaires en période de confinement ne sont pas respectées dans leurs entrepôts (et vous mettez en danger leurs employés en commandant chez eux) ? () Eh oui j’ai fait partie de ces clients, et d’ailleurs je devrais arrêter ma souscription Prime que je n’utilise plus…
  • Regarder de la pornographie, en faisant semblant d’ignorer que cela soutient le commerce du trafic sexuel ? Ouais ouais on sait, « mais tout le monde le fait » serait une excuse valable pour soutenir cette industrie d’après les experts… attendez, d’après qui ?
  • Acheter des cartes postales d’un enfant en Birmanie alors que cela encourage ses parents à ne pas l’envoyer à l’école ? Oui je me suis fait avoir la première fois. J’ai encore ces cartes postales d’ailleurs sur mon mur… Mais peut-être qu’il vaut mieux que l’enfant réussisse dans le tourisme des cartes postales plutôt que dans des trafics sexuels douteux ? Question délicate, très délicate.
  • Acheter des vêtements dont vous n’avez pas besoin pour le montant d’une nuit d’hôtel, alors qu’il y a un SDF à la sortie de votre magasin ? A San Francisco, où j’habite, cette question est permanente. Dès que j’achète un donut il y a quelqu’un dehors qui demande des dollars pour s’en acheter un aussi. Je craque la plupart du temps… j’ai du mal à supporter cette différence de niveau de vie.
  • Nager avec un dauphin dans un centre aquatique, alors que celui-ci est enfermé à longueur de journée dans un bassin bien trop petit pour lui ? J’ai réalisé ce rêve un jour… puis je m’en suis tellement voulu quand j’ai vu la taille des bassins depuis le haut des gradins. Tout à coup, je ne rêvais plus d’être un dauphin…

Allez, je répète la question de départ : qui est, métaphoriquement, le docteur qui vous ment en vous disant que le corps que vous avez acheté a été créé en laboratoire… alors que c’est le corps d’un vrai être humain tué indirectement par votre achat ?

Ou encore, de façon plus générale (oui oui, j’adore les métaphores !), si vous repensez à l’histoire d’Hansel et Gretel, quelles sont ces buffets de délicieux gâteaux dans une merveilleuse maison faite en pain d’épice, ces gâteaux auxquels vous décidez de ne pas résister… tout en ignorant que cela va réveiller une sorcière qui va vous emprisonner pour vous manger à son tour ? Ou si ce n’est pas vous, votre sœur ? (On sait que vous n’aimez pas trop votre sœur mais elle ne mérite pas non plus d’être mangée !)

 

Retour au récit : Le docteur explique ensuite que les pilules que Damian prend ne sont pas pour juste éviter les hallucinations : elles servent à effacer les souvenirs de Mark encore présents dans le cerveau. S’il arrête de prendre la pilule… la conscience de Mark reviendra à la vie et celle de Damian s’effacera naturellement. S’il continue à les prendre… il ne restera rien des souvenirs de Mark. C’est compliqué de partager un corps et un cerveau !

La femme de Mark, elle, voudrait bien évidemment son mari à nouveau. Pour la première fois de sa vie, Damian se rend compte qu’il doit choisir entre immortalité, au détriment de l’unité de cette famille… ou bien choisir de littéralement s’effacer, pour que la famille retrouve son père.

Il se rend compte que son plaisir de la vie, des fêtes, des femmes, de l’alcool, du bungee jumping, est bien en-dessous du bonheur qu’il apporterait à cette famille en choisissant d’arrêter les pilules, et ressusciter Mark.

(Spoiler ! Je vous ai prévenu) Il finit donc par arrêter les pilules… et Mark revient en pleine conscience. Il retourne à sa famille, tout le monde est heureux, et Damian est finalement mort pour de bon, en paix.

Sa seconde vie, malgré son « cerveau de génie », ne valait pas celle d’un autre homme. Le bonheur en famille ne vaut pas l’argent à foison. Mais ce n’est pas sur cela que je réfléchissais intensément pendant le générique de fin…

Moment Réflexion n°3 :

Quelles sont les pilules que nous prenons au quotidien pour oublier de penser au bonheur d’autrui, de rendre service ?

Je vous laisse y penser un moment…

Un début de réponse : Tout ce qui est distraction en excès. Regardez Damian : en plus des pilules, ses journées n’étaient pas si productives que ça malgré son « cerveau de génie ». Elles étaient exclusivement consacrées à lui faire plaisir à lui. Le jour où il arrête les pilules, il arrête également sa vie de luxe démesuré. Coïncidence ? Je ne pense pas.

J’aime regarder des séries… mais si c’est mon seul hobby, et que mon job quotidien n’est pas très utile à la société en soi, alors de quoi sont faites mes journées ?

Est-ce que je sors avec des gens pour oublier ma solitude et me sentir appréciée, ou bien pour devenir proactivement leur amie et apprendre à vraiment les aimer ?

Est-ce que j’utilise plus les réseaux sociaux pour montrer tout ce que je sais faire et recevoir des compliments, ou bien pour regarder si un de mes amis exprime un besoin et me rendre disponible pour l’aider en conséquence ?

 

Conclusion

Self/Less : traduit par « Renaissances » dans la version française (ouch j’ai mal). Normalement, on dit « Selfless », pour « Altruiste ». Le titre a été bien choisi : Damian qui apprend à penser aux autres… et surtout encore moins à lui-même. « Self » est « soi » en anglais, « less » est « moins ». « Moins soi » = « Altruiste ».

Être moins soi, c’est arrêter de prendre les pilules de l’oubli. C’est permettre à un autre de vivre, et rendre une famille heureuse.

 

Alors, quels sont vos débuts de réponse aux Réflexions 1, 2 et 3 ? Partagez-nous en commentaire !

 

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